« Lointaines merveilles », c’est un peu vague comme titre de roman de l’été 2016, pour se situer géographiquement.
Mais il suffit de regarder l’illustration de la première de couverture pour deviner. Cuba. Nous partons à Cuba. (oh que je te sens surpris !)
Nous allons remonter les années dans ce pays. Oui, encore plus que ce qui est déjà le cas là-bas, sur ces terres qui vivent dans un présent un peu passé.
Allez grimpe avec moi dans cette Pontiac brinquebalante et aux sièges surchauffés au soleil tropical qui brûlent l’arrière-train !
Le résumé
Cuba, 1963. Le terrible ouragan Flora s’apprête à frapper l’île. Les
habitants sont évacués en urgence. Dans l’ancienne demeure du
gouverneur, sept femmes sont cloîtrées sous la surveillance d’une jeune
soldate de Castro, Ofelia. Pour passer le temps, la vieille Maria
Sirena, Shéhérazade des temps modernes, leur raconte des histoires.
Car Maria Sirena est une conteuse hors pair. Elle en avait d’ailleurs
fait son gagne-pain à la grande époque des fabriques de cigares où elle
était lettora, employée à égayer les journées des rouleurs de tabac par
ses récits fantastiques. Dehors, la tempête fait rage. Maria Sirena
débute son histoire : son enfance pendant la troisième guerre
d’indépendance cubaine, son père, rebelle féroce, sa mère, passionnée et
passionnante qui a aimé, rêvé et s’est battue comme personne.
À travers les récits de Maria Sirena se dessinent l’histoire de Cuba,
île au passé troublé par les luttes pour l’indépendance, mais aussi une
époustouflante saga familiale.
Mon avis
Si le livre est un peu long à démarrer, on se laisse ensuite rapidement emporter par ces personnages hauts en couleurs. Qu’on se le dise : le peuple cubain ne fait pas dans la demi-mesure et nous autres, occidentaux, pouvons nous en retrouver un peu déboussolés. De cette façon, tu ne sais pas trop comment tu pourras considérer Lulu, la mère de l’héroïne, tantôt mère-courage et tantôt petite chose futile et frivole.
J’ai été touchée par le personnage de Maria Sirena, à l’instar de sa mère, courageuse et fière, qui fera amende honorable de ses erreurs avec pudeur et sincérité.
Si je commence à être bien informée sur la montée du castrisme et le rôle joué par le Che, j’ignorais tout des guerres d’indépendance et du rôle de Jose Marti, poète, politicien et donc personnage central de l’Histoire cubaine, que l’on retrouve partout et surtout dans toutes les bibliothèques du pays dans toutes les rééditions possibles. Ce livre apporte un éclairage sur cette période historique plus antérieure, moins connue des étrangers, et vécue de l’intérieur avec toute la subjectivité dont est capable une femme.
La plume de Chantel Acevedo est douce, sans chichis. J’ai pu respirer à nouveau au travers de ses écrits l’odeur iodée de La Havane, sentir sur ma peau la moiteur des montagnes de l’est, trembler pour ce peuple démuni face aux catastrophes naturelles qu’il subit régulièrement comme c’était le cas avec le cyclone Matthews il y a de cela peu de temps, dans la même région que celle de la narratrice.
Par la magie de son style, l’auteur nous fait bien ressentir la maturité gagnée par la Maria Sirena conteuse sous un cataclysme météorologique, à contrario de la fougue guidant les pas de sa jeunesse quelques années auparavant.
La chute du roman est profonde, touchante et terriblement réaliste. Une réalité qui existe encore dans certains pays sous-développés.
Mon unique déception viendra de la fin à mon sens un peu rapide. Si l’on connait les moindres détails de la vie de Maria Sirena lors de la guerre d’indépendance, on ne sait quasiment rien de la façon dont elle a reconstruit sa vie par la suite après toutes les luttes et les traumatismes endurés.
Traumatismes dans les camps de « reconcentrados » également survolés, alors que le lecteur occidental ignore pour beaucoup de quoi il est question. Si l’on connait bien les camps de concentration nazis, c’est beaucoup moins le cas des camps espagnols ! Ma curiosité est piquée, j’aurais aimé en apprendre davantage.
Au final ?
Ce livre est une belle découverte.
Malgré trois voyages à Cuba et pas mal de documentation à propos de ce pays, je ne connaissais pas l’histoire relative aux guerres d’indépendance. Ce roman m’a permis d’en apprendre davantage de manière romancée et émouvante. Il est donc également largement à la portée du lecteur néophyte en culture cubaine.
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